lundi 30 juin 2003

Accidents au gaz a fond

Quasiment pas d'attentats en ce moment. Ca a le merite d'etre dit.



En revanche ce week-end 11 personnes se sont faites tuer sur les routes, et sept autres dans une explosion au gaz a Tel-Aviv ce matin. Rien entendu. Pas de personne morale a designer comme reponsable. Pas de photo des victimes en premiere page du journal. Nous n'avons pas a faire a des martyrs. Pas de victimes potentielles non plus. On a envie de se plaindre, de dire que "c'est la merde", mais non on peut pas dire ca non plus. Pourtant les chiffres des victimes sont les memes qu'en periode d'attentat. Les souffrances aussi atroces. Les pertes aussi irreparables.



En fait, quand arrive un drame, la star c'est pas la victime. La victime on l'oublie. C'est le responsable qui est au devant de la scene. Le kamikaze qui a donne sa vie pour la mort des autres, et toute la logistique derriere lui. Ici le reponsable c'est l'usage barbare du gaz de cuisine, et la conduite en voiture. C'est difficile de faire un pamphlet avec ca. On a envie de se la jouer militant, mais ca vient pas. Pas assez croustillant. On peut essayer de se la jouer philosophe. Un peu cynique quand meme. On peut regarder ca en ingenieur du dimanche aussi, pour trouver le modele a l'origine de l'accident, et s'approcher d'une solution.



Qu'est-ce qu'on peut faire avec le gaz ? Il a meme tue a la bourse de Paris. Nos sources d'energie, que ce soit l'electricite nucleaire l'essence aux hydrocarbures ou le gaz naturel, sont dangereuses. Mais l'homme ne peut pas y renoncer. En tous cas pas comme ca. Plus l'homme avance, plus il est gourmand en energie, plus ses villes sont des bombes a retardement. Mais le probleme n'est pas tant la quantite d'energie qui est consommee, que la quantite qui est stockee. Une bonne grosse centrale nucleaire prete a nous rejouer Tchernobyl, une bonne grosse bonbonne de gaz au rez-de-chaussee d'un immeuble, un bon gros reservoir d'essence dans un camion qui perd les pedales. L'energie ne circule pas assez vite, elle est stockee en grande quantite, et elle se rebelle contre cet emprisonnement. La solution aux bonbonnes de gaz qui explosent a Tel-Aviv ou a Paris, c'est peut-etre la fin du stockage. Trouver un systeme qui permettra a l'energie de se liberer en un flux continu entre la source et le consommateur. Comme dans la Nature, avec ses vents, ses vagues, ses nuages, ses pluies, bref ses cycles.



Pour la conduite, commencer par le constat. Les israeliens sont des chauffards qui tuent environ 700 de leurs compatriotes chaque annee, deux fois plus que des terroristes palestiniens. Les francais sont legerement pire avec leurs 8000 morts par an pour une population dix fois plus nombreuse, mais ca n'excuse rien.



Moi je me souviens de ce depassement sur la route d'Eilat alors que le camion surgissait de la cote. Je me souviens du coup de volant a droite quand la voiture d'a cote a deboite sur sa ligne. Je me souviens de cette nana qui traversa la route sans regarder, a peine effrayee par le crissement de mes pneus. Du 4x4 qui foncait depuis ma droite au virage de la bretelle de sortie d'autoroute. Ce retour de soiree completement stone. Tous ces moments effrayants ou tout aurait pu basculer en une fraction de seconde. J'imagine les recits d'accidents des amis des amis des amis. Ca me terrorise d'autant plus que je suis la personne la plus distraite que je connaisse. C'est sans doute ca qui eveille mon attention au volant, ce peu de confiance en ma capacite a la concentration.



Je connais par coeur les clips radiophoniques qui passent a longueur de journee sur Galgalatz, la radio "jeune" de l'Armee. Un acteur celebre a ete selectionne pour rabacher les memes messages aux israeliens au volant enerves par la chaleur et le temps jamais suffisant.



"oui tu veux atteindre, y arriver, etre a temps, allo allo une minute, tu files ou la ? Apres qui tu cours ? La vitesse elle a d'autres projets pour toi, elle t'amenera quelquepart ailleurs. Alors lache un peu l'accelerateur !"



"dans la vie il faut savoir parfois renoncer, si quelqu'un te coupe la route, t'est pas oblige de lui rendre la pareille, ca veut pas dire que tu t'es degonfle, ca veut juste dire que t'as renonce, tu as renonce pour ton bien et pour le bien de ta famille, la route c'est pas un endroit pour les duels et les gueguerres, sur ta vie, reste cool !"



Ces messages representent tellement toute la psychiologie israelienne, les nerfs toujours a fleur de peau, avec en meme temps une nonchallance et une temerite deconcertante. Ces messages ont ete choisis par ceux qui passent des heures et des jours a essayer de faire prendre conscience aux citoyens du danger qu'ils representent sur leurs quatre roues. Parfois on choque, parfois on amuse, parfois on fait pleurer, parfois on surprend le flagrant delit via les mots les images et les caricatures.



Ces soldats de la guerre pour la securite routiere ne seront jamais presentes en heros. Il n'y a pas de terroriste a attrapper. Le danger c'est soi. Le heros c'est le conducteur qui arrive chez lui, peu importe en combien de minutes, pourvu qu'il n'ait mis en danger ni les autres ni les siens ni lui-meme.



Pour le gaz comme pour les accidents de la route, le probleme n'est pas la technologie, le probleme c'est l'homme, du moins son education. Son rapport a l'energie, son rapport au temps, et son rapport a l'outil. Il stocke l'energie par peur de l'avenir, il cours apres le temps pour lui echapper, il use de l'outil pour dominer les autres hommes. Il est immature, il refuse d'etre une marionnette de la Nature, et ca le tue.



Dedoublement linguistique שפה כפולה



Aujourd'hui j'ai rempli un formulaire a la Police pour dire qu'on m'a defonce la vitre avant droit de la voiture. Tout ca en hebreu, et j'ai demande l'aide de personne. Le flic n'a pas bronche. Meme mon ecriture s'affirme.



Aujourd'hui, c'est mon blog que je vais remplir en hebreu.

En ce jour saint, mon blog se dedouble linguistiquement.

Dans trois ans, je suis chroniqueur au Ha'aretz (c'est pour le prestige, je me ferai passer pour un mec de gauche).



äéåí äéåí äæä îîù, àðé îìàúé úåôí ãå''ç îùèøä, ëãé ìäâéã ìäí ùôøöå ìé àú äçìåï ùì äàåèå.

åáòáøéú, áá÷ùä, áìé òæøä îàó àçã. äùåèø ìà äúìåðï. àôéìå äëúéáä ùìé îøàä éåúø áéèçåï.

äéåí äéåí äæä îîù, ðåìã äáìåâ ùìé áòáøéú.





lundi 23 juin 2003

Clear and Present Danger



J'aime bien parler des films que je viens de voir.

Je viens de terminer Armageddon, tombe dessus par hasard en allumant pour la premiere fois la chaine cinema de la television satellite israelienne YES.

Forcement, j'ai kiffe ma race.

Ils ont enchaine direct sur "Clear and Present Danger", avec Harrison Ford, et c'est en fait de ce film dont je vais parler. Alors qu'il n'en est qu'au debut, et que je vais me coucher parce que demain boulot.



Un bateau est arraisonne par les gardes cotiers americains en Mer des Caraibes. Dedans, deux types avec la chemise immaculee de sang, et dedans, une famille entiere, pere, mere et les deux enfants en bas age, assassines sauvagement.

Devant le compte-rendu de la CIA dans le bureau ovale de la Maison Blanche, le President est enerve, parce que le pere c'est un pote a lui. Pourquoi ? demande-t-il. La drogue, lui repondent les collegues d'Harrison, un reglement de compte d'un cartel de drogue colombien.

Il est tres tres enerve le President, il a promis au peuple americain qu'il les debarrasserait des problemes de drogue, et voila qu'il decouvre que les cartles appliquent une loi de la jungle cruelle sans distinction de leurs cibles.

Il donne un ordre a son ministre de la Defense. Le ministre lui demande de repeter. "La drogue represente un clear and present danger to the security of the United States". Bref, c'est la guerre contre la drogue qui commence.



Ca en jette, non ? Et puis franchement, on est d'accord avec Mister President. Faut leur mettre sur la gueule a ces connards. Ca ne souleve aucune question morale. Tiens on va meme regarder le film pour voir comment ils vont faire...



La semaine derniere, une embuscade sur une route de la vallee du Jourdain, d'un cote ou de l'autre de la ligne verte, mais ca a peu d'importance, on parle de meurtre. Les balles du terroriste palestinien ont arrose la voiture. Le pere est mort. Une de ses fillettes de 7 ans est decedee aussi. Elle a sauve avec son corps la vie de sa petite soeur de 3 ans. Le "resistant" est toujours en liberte. C'etait juste une famille qui rentrait de week-end. C'est arrive plusieurs fois pres de chez nous, ca s'appelle la Lutte de Liberation de la Palestine.

Qu'est-ce qu'il devrait dire, Sharon ? C'est pas du cinema, mais le cinema ca sert bien pour les phrases-choc. Retour au titre. Roulement de tambours.







dimanche 22 juin 2003

Un air connu



Quand je disais que le Monde devenait sympa avec Israel... a vrai dire on sait jamais trop.

Voici un passage de l'article sur la liquidation de Abdallah Kawasmeh par les unites speciales de Tsahal:





Ce dirigeant du Hamas était responsable d'au moins cinq attentats meurtriers anti-israéliens, dont celui du 11 juin contre un autobus au centre de Jérusalem-Ouest qui a fait 17 morts, outre son auteur, selon la même source. Son décès porte à 3 355 le nombre de personnes tuées depuis le début de l'Intifada, fin septembre 2000, dont 2 527 Palestiniens et 768 Israéliens.





Voila voila... Silence. Glups. On avale.



Deux manieres d'interpreter la rhetorique du quotidien, qui je le rappelle est une reference intellectuelle de la societe francaise :



  1. Un monstre du genre humain a ete tue, ce qui fait 2527 morts palestiniens. D'un air de dire qu'il est question de 2527 terroristes palestiniens de ce type.

  2. Un mort est un mort, y'a pas de contexte. C'est a dire qu'un chef du Hamas liquide par Tsahal, et une fillette tuee par balle dans une embuscade, ben c'est pareil.





L'ironie, c'est que quel que soit le camp auquel on appartient, les deux interpretations possibles ci-dessus sont aussi monstrueuses l'une que l'autre.





vendredi 20 juin 2003

J'allais faire un truc debile



Dans les salles de bains, souvent, se trouvent aussi les toilettes.

A l'instant, la, en sortant de la douche, j'ai failli faire un truc debile. J'etais en pleine reflexion, et en meme temps comme chaque matin j'ai voulu mettre du deodorant sous les aisselles. J'ai donc pris la bombe de sent-bon a la lavande qui etait sur la chasse d'eau, j'ai souleve un bras, et j'etais sur le point d'appuyer. Je me suis repris a temps.



Encore un peu et je sentais les chiottes toute la journee...



Pourtant je devrais savoir que je ne mets pas de deo en spray, d'ailleurs pas plus tard qu'hier je me disais que je preferais de loin mon deo en stick-gel.



Ne pas faire de choix, je veux bien, marionette a la limite, mais astronaute... faut que j'atterrisse.\





Bloquage post-creatif



Je devrais demarrer ma journee, mais je tourne en rond. En fait au reveil j'etais bien parti, et puis j'ai voulu parler du film que j'ai vu hier soir a minuit sur l'ecran geant de Cinema City a Herzliya. J'ai produit quelquechose. C'est ma seule activite creatrice en dehors du boulot. Et depuis je tourne en rond, a cogiter sur la place de ces ecrits dans mon karma, a esperer la reconnaissance par les autres. L'important n'est pas de savoir si j'ai ecrit un "bon" texte ou pas, l'important est de creer.



Ca m'avait manque, d'ecrire.



L'homme cree pour desservir une seule chose: son ego. Un sage m'a dit que pour trouver la paix, je devrais cesser de creer et de faire des choix. Je devrais accepter mon role de marionnette. Tel le sachet en plastique Monoprix d'American Beauty qui virevolte au gre des courants d'air dans une ruelle. C'est vrai qu'il etait beau ce sac en plastique, en harmonie parfaite avec le vent. J'ai essaye d'ecouter le sage, mais c'est trop difficile. Je veux garder le controle, alors que le controle n'est qu'une illusion, et par consequent je suis sous controle, jamais aussi libre que le sac en plastique dans son vent.





  • On cree pour exister. Mais est-ce qu'on existe pour creer ?

  • L'homme n'est jamais en paix tant qu'il cherche a faire des choix. Mais l'homme veut-il vraiment la Paix ?





Bon, moi je vais a la plage Gordon. Parait qu'y'a des strings et des monokinis.





Rechargée



Morpheus croit tellement dans la Prophetie, que ce n'est pas une question d'espoir, mais juste une question de temps.



L'important n'est pas le choix que l'on fait, ton choix est deja fait, lui dit l'Oracle. Tu n'est là que pour comprendre pourquoi tu le fais.



Selon le Merovingien, nos choix ne sont qu'illusions, fruits d'operations d'alchimie agencees par des esprits cyniques.



Selon le Faiseur de Clefs, nous sommes la pour faire ce que nous avons a faire. (Bon, ca c'est un peu facile quand meme...)



Selon l'Architecte, dans la Matrice, l'homme est une anomalie, qui se propage jusqu'a la destruction. Et cette anomalie se resume a une seule notion: le libre arbitre. De la meme facon, Sion est menacee par l'intrusion froide d'un programme-agent dans l'esprit d'un de ses habitants. Ca va faire six fois que Sion est detruite, et on en est a la sixieme version de la Matrice. Deux entites-miroir reparties de part et d'autre de la frontiere entre le reel et le virtuel. A chaque fois, c'est un choix humain qui a decide du double-cataclysme.



Voila pour le gros des reflexions laissees par le Matrix Reloaded tant attendu.

Cela n'a pas ete le choc du premier. Tout le monde a deja compris que nous vivons dans un simulation dirigee par des programmes cyniques, pas de surprise de ce cote-la. Mais les reflexions philosophiques sont toujours au rendez-vous, et l'esprit du spectateur est toujours mis a contribution comme une larve humaine branchee sur la Matrice.

Et puis c'est beau.



Un vrai film d'Ashkenazes ce Matrix, avant-garde et torturé a la fois.



Bon en attendant la fin de la trilogie, j'ai Terminator 3, l'Incroyable Hulk, et faut que je me rattrappe sur Dardevil et X-Men 2. Derriere la SF, toujours le meme theme des hommes qui se depassent pour se maintenir a la fois en symbiose et en concurrence avec l'hegemonie technologique.



dimanche 15 juin 2003

Un"Monde" meilleur



Charmé par un des derniers editoriaux du journal "Le Monde", souvent honni par la reference The Blog of The Boq.

L'editorial s'appelle "Feuille de Sang", et est date du 12 juin 2003.



Extraits:

Israël a raison de se refuser à mettre sur le même pied la monstruosité de ces attentats-suicides et les opérations menées contre des groupes armés palestiniens dans les territoires. Mais cette considération, importante, fondamentale, [...]



Merci de rappeler l'opinion publique francaise a cette evidence... D'autant plus que cette verité n'a jamais été dite avec des mots aussi clairs dans ce quotidien tout au long de la Deuxieme Intifada. Longtemps on mettait sur un meme plan le meurtre et le meurtre, les victimes et les "victimes", designant sans distinction le cadavre de l'islamiste au zizi enturbanné et celui de la serveuse du bar qui a explosé avec le corps de ce dernier. Un parfum de morale rassurant, au milieu de ce bain d'horreurs.



Autre extrait:

Le 8 juin, les organisations palestiniennes extrémistes, dont le Hamas, entreprenaient de saboter cette perspective. Elles montaient une provocation : un raid contre une position de l'armée à Gaza (quatre militaires tués).



En d'autres temps arrierés, pas si eloignés, on considerait dans l'intelligentsia francaise ces operations de lacheté organisée comme un combat reglo, comme si les pijistes etaient presque enchantés par la capacite des palestiniens a se comporter comme de vrais "soldats", s'en prenant a d'autres soldats. On allait jusqu'a faire une distinction entre la mémé dechiquetée et le couple de soldats brulés dans le bus figés sur un baiser comme dans une derniere etreinte. L'une est une mémé qui n'a rien demandé d'autre que de profiter du crepuscule de sa vie, les autres sont des soldats qui du fait de leur uniforme sont censés savoir a quoi s'attendre, meme dans un bus qui les ramene a la maison.



Sur le meme ton que l'ensemble des protagonistes du conflit israelo-palestinien qui questionnaient "Qu'est-il arrivé a Arik ?" en voyant Ariel Sharon serrer la main de Mahmoud Abbas a Aqaba, on a envie de dire "Qu'est-il arrivé au Quai d'Orsay ?". Mais on comprend vite que ce ministere, humilié par sa politique a la limite de la collaboration lors de la derniere Guerre d'Irak, a decidé d'inverser la vapeur. Premier signe: un discours de De Villepin a Jerusalem a faire pleurer d'emotion tout Juif francais sioniste encore attaché aux valeurs de sa chere Republique de naissance. Deuxieme signe: un changement de directives a l'AFP que Chirac controle, s'en suivant naturellement d'un changement des lignes editoriales des France 2 et autre journaux Le Monde qui alimentent et guident la pensée unique francaise en matiere de politique etrangere.



Devant des phrases aussi justes, on est tout d'un coup pret a lire la suite, confortés par ce terreau moral retrouvé.

Extrait, suite du premier:

Mais cette considération, importante, fondamentale, ne change rien à la situation. Chacun, dans cet affrontement, connaît les règles et, à l'avance, les réactions de l'autre. La séquence attentat/riposte est réamorcée ; le cycle du sang prend le pas sur la "feuille de route", une fois de plus.



Et c'est vrai. Le cycle attentats-represailles, lancinement appele "cycle de la violence" par les medias francais et autres, resume toute la face emergée de l'iceberg du conflit israelo-arabe. Les arabes attaquent tout azimut a coups de crimes contre l'humanité, et nous les israeliens repondons en visant les criminels, sans trop de consideration pour les degats alentours parmi la population. Ca rejoint la philosophie de mon ami S., "ils nous frappent, on les frappe, et ils nous frappe, et on les frappe, et rien ne peut arreter ca". C'est un changement en profondeur des mentalités qui est necessaire, d'un coté un assainissement de l'education palestinienne qui tourne autour du culte du martyr, et d'un autre coté un appel a Israel a se depasser de sagesse et de retenue avec une philanthropie encore jamais osée a travers le monde et les ages par aucun pays et aucun homme soucieux de la securite des siens. A part par Jesus, enfin bon, bref...

Mon avis est que le defi moral demandé a Israel est bien plus difficile, presque impossible d'un point de vue simplement humain, que de simplement expliquer aux enfants palestiniens que tuer des gens au hasard c'est mal, et que se suicider pour ca c'est encore pire.



Quoi qu'il en soit, le Monde a enfin fait un editorial a peu pres bon. Qu'il continue et alors je commencerai a lire ce journal intellectuel avec autre chose qu'un melange de colere et de mepris.









jeudi 12 juin 2003

Crimes de religion



Sur la version papier du Ha'aretz de ce matin, une photo de Jerusalem ou l'on voit des religieux juifs ramasser les corps des victimes de religieux musulmans déguisés en religieux juifs.

Le crime: meurtre de masse avec premeditation, et revendication. Justification implicite de la part de nombreuses manifestations a travers le monde.



Ce matin, pour une raison joyeuse comme une double Bar-Mitzvah, j'ai mis mes teffilines et mon tallith.

Le crime: Faire ca sur une colline reclamee par d'autres. Denonciation explicite par de nombreuses institutions a travers le monde, dont peut parfois decouler la justification implicite du crime cité plus haut..



Ah, et aussi un rabbin m'a beni aujourd'hui.



Fier d'etre juif.





mardi 3 juin 2003

Nausée televisuelle



J'ai pas la télé depuis mon demenagement, soit presque deux mois. J'ai pas internet rapide non plus, seulement une vague connection modem avec le boulot. Tout ca parce que je n'arrive pas a me mettre d'accord avec la compagnie israelienne de satellite YES, qui propose un paquet Satellite+ADSL. Whatever. Le probleme c'est qu'il faut que je m'engage pour un an, et je sais pas faire ca, moi. J'ai envie de ne m'engager que pour six mois, le temps du prix preferentiel. Chacun veut entuber l'autre, et en atendant boq il reste coupé du monde.



Bref, tout ca pour dire qu'hier j'ai regarde la télé pendant un apéro chez mon copain S.. Il y avait un reportage sur la premiere chaine, par un chercheur de l'Université de Tel-Aviv qui fait une enquete sur le phenomene kamikaze chez les Palestiniens. Il a du courage le mec. Il a la "chance" d'avoir une tete d'arabe, et de parler arabe, ce qui lui a ouvert des portes. Je croyais que c'etait un arabe israelien mais en fait non c'est un Juif d'origine irakienne.



Des reconstitutions d'infiltrations de terroristes en Israel, des interviews d'agents du Shabak qui en ont interceptés, des sequences tournées dans une salle de classe palestinienne. La salle de classe etait tres propre, tres colorée, l'instutrice s'occupait calmement des enfants, les enfants avaient leurs grands yeux ouverts vers les revelations de ce monde. Vu d'exterieur une classe tout a fait normale et mignone.



De mon point de vue c'etait bizarre. Je ne lis pas l'hebreu tres vite, et souvent je suis trop feneant pour lire les sous-titres. Alors je me laissais aller a regarder les images et a ecouter l'intonation des voix arabes, a observer les regards. Les gens sont attendrissants, parfois beaux, leurs yeux brillent. Jusqu'a ce que S. me facilite la traduction, et la c'est un nouveau monde de cauchemar qui s'ouvre et une nausée qui monte.



Ils parlent tous de tuer des juifs ou qu'ils soient. Ils parlent d'explosions, de rivieres de sang. Les enfants palestiniens aux voix de cherubins chantent des chansons a la gloire des Shahids, racontent leurs reves: soit des israeliens les tuent, soit ils tuent des israeliens. Cette fillette qui confie qu'elle aimerait exploser dans un bus pour que ses parents soient fiers d'elle.

Le plus cocasse c'est cette interview d'un type du Jihad Islamiste arreté a Tul-Karm avec sa ceinture d'explosifs sur lui alors qu'il etait en route pour un attentat a Netanya. Il parle devant la camera de l'ideologie qui entoure son acte, la logistique de l'infiltration, les details de l'arrestation. Les policiers ont fait exploser sa ceinture a quelques centaines de metres de la. J'ai reussi a lire partiellement les sous-titres. Le prisonnier racontait, les larmes aux yeux, son sentiment quand il a vu l'importance de l'explosion. Quelquechose de gigantesque, d'assourdissant. Il confiait qu'il n'imaginait pas a quel point l'explosion etait violente. Il pleurait. Il realisait qu'il aurait pu tuer 15 personnes, et en blesser au moins 200. Moi je me disais, "tu m'etonnes comment il doit regretter". Le journaliste lui demande si il regrette, mais le prisonnier repond alors qu'il ne regrette pas ce qu'il doit faire pour Allah. S. m'explique que j'ai pas bien compris le contenu du discours du mec. Il regrettait en fait de s'etre fait attrapper. C'est avec desespoir qu'il constatait que, malheureusement, il n'avait pas reussi a tuer 15 personnes et a en blesser 200 autres. Il etait tellement triste...



Ceci est un reportage televisé, une simple fenetre par definition subjective. Non pas partisan mais concentré sur un seul sujet: les auteurs d'attentats-suicide, et la mythologie qui entoure ces actes dans la societé palestinienne et l'education des enfants. Le but n'etait pas d'interviewer des gens sains d'esprit.

Il n'en reste pas moins qu'on a envie de vomir a la fin du reportage, qui pourtant ne contient pas une seule goutte de sang. Juste des mots, des commentaires, des interviews des gens concernes: des palestiniens authentiques, des enfants innocents dont le cerveau est lobotomisé depuis les bancs de l'ecole, dans les mosquees et dans les discours enflammés du Rais Arafat. On n'arrive pas a se defaire de cette conviction que le peuple palestinien est un peuple de damnés, qui selon les mots de l'ecrivain Amos Oz "recherchent le massacre", peu importe que les victimes soient israeliennes ou palestiniennes, qu'ils se dirigent vers un desastre, et qu'ils sont decidés a nous emporter avec eux. La mort est omnipresente.



S., lui, israelien de naissance, qui a basculé tres a droite le jour ou il s'est retrouve par hasard a ramasser les corps en lambeaux lors du double-attentat de Beit Lid en 1996, se contente de dire dans un francais roucoulant herité de sa mere: "ils sont trop betes ces Arabes".



dimanche 1 juin 2003

Friends



Je suis bronzé. Je suis beau. Et puis je suis gentil, c'est elle qui me l'a dit.



Mais c'est surtout parce que je reviens d'une semaine fantastique. Les amis, les vrais, c'est ceux qui arrivent a l'aeroport avec leur grosse voix, leurs lunettes de macroc, leur cigarettes fantaisie, et qui vous font la surprise d'amener encore d'autres amis. Des cris de joie dans la salle des arrivees a l'aeroport Ben-Gourion. Je commencais justement a jalouser les etreintes des familles reunies sous mes yeux, mais je crois que mon cri a surpasse tous les autres.



Et la on enchaine sur une semaine de vacances, de vraies vacances. Des vacances forcees a l'origine, chomage technique en d'autre terme, une semaine de shutdown de la compagnie pour economiser de l'argent. J'ai deja depasse monn quota de conges, donc c'est a mon compte. Mais avec tous les impots que je paye, avec une semaine de salaire en moins je bascule dans la tranche d'en dessous et finalement neto sur le mois je ne perd que quelques centaines de shekels. Tout va bien.



Je me suis retrouve dans le role de touriste, a la seule difference que j'ecrasais mes copains en hebreu. Pendant une semaine, petit-dejeuner a 13h, plage, manger, combats dans l'eau, manger, drague, manger, douche, manger, strip-tease, boite, boire, a la discretion de l'interesse. Maintenant on connait la barmaid Adi de la plage Gordon, et la serveuse Kali du Mike's Place. Un souvenir que mes amis emporteront a leur retour a la grisaille parisienne. J'ai meme reussi a faire jouer de mon carnet d'adresse a la rubrique "femmes" pour agrementer nos soirees d'une presence seductrice. Ca va ils ont pas l'impression que je m'emmerde a Tel-Aviv, c'est l'essentiel, faut que je garde ma reputation.



Une veritable regression a l'age de pierre, ma maison n'a jamais ete autant en bordel, des rires debiles a faire pleurer de pitie des gosses de cinq ans. Tres peu de discussions sur des sujets autres que le cul. Des bains de minuit, des piqures d'encules de moustiques, des films compromettants, des humiliations aux matkots et au backgammon, des combats aux bouteilles d'eau, des rateaux memorables, des menaces de defoncage de cul pour tout et n'importe quoi, des nouveaux mots inventes et aussitot enregistre dans notre dictionnaire mutant.



J'ai repris le boulot, mais ce soir, avant que le groupe se scinde pour une duree indeterminee, on met un point final avec une course de Karting, pour que chacun comprenne bien qui est le demon dans l'histoire. D'ou l'interet d'ecrire ca maintenant: Bugs, Jean-Brute, J'ANNONCE que je vais vous humilier d'une maniere tres tres sure.



Des moments d'amitie comme ca, c'est precieux, et encore trop rare ici.



J'ai vraiment, mais vraiment pas envie de bosser aujourd'hui. Je me casse.













Un bloggueur, une bloggueuse



Qu'arrive-t-il quand un bloggueur rencontre une bloggueuse ?

Pre-condition: chacun kiffe le blog de l'autre, chacun "s'y reconnait". Ils sont acquis aux technologies basiques de l'internet: mail, chat, hyperliens, forums. Ils se connaissent beaucoup tres vite. Ils savent des choses tres intimes l'un sur l'autre, et ils savent les exprimer. La curiosite monte, et monte, comme une creme atteignant le sommet. Et ils se rencontrent. N'importe-ou dans le monde. Meme le billet d'avion est a un clic de distance.



Plongee en apnee dans "la vie reelle". Celle des regards, des sourires, des silences, des blagues, de la repartie, la vraie celle-la, pas celle qui est murie par les quelques secondes que l'on fait passer pour une latence du reseau. On se souvient qu'on a un corps. Qu'on peut s'en servir. On se connait si bien et en meme temps pas du tout. A la fois alter-ego et etranger. On peut tout se dire, tout se permettre. Les fantasmes sont a ciel ouvert.



Cette emotion aussi a savoir que la personne de l'autre cote de l'ecran a des amis, des gens qui l'ont connu depuis sa vie anterieure au blog. Des gens qui le ou la connaissent, par voie aerienne cette fois, tactile, visuelle. Des mensonges aussi. Oui cette personne est vraie. Elle n'est pas forcement fidele au role qu'elle se donne par ecrit, mais elle est authentique.



La question est de savoir si une veritable relation peut se creer. Question d'autant plus difficile que la distance geographique vient parfois s'eriger comme un mur de defi. Il faut etre tres tres sur de soi pour promettre des choses a travers les mers. L'assurance paye, mais elle n'est pas systematique. Les doutes sont fatals. Aussi souple soit-elle, la rencontre epistolaire est excessivement exigeante. On veut exactement le produit du catalogue, sinon on le renvoie au fournisseur. Mais que l'on soit decu ou agreablement surpris, souvent les deux a la fois, le produit affiché dans le catalogue internet est decidement merveilleux. En attendant de sortir ses couilles dans la vie reelle, on peut rester des heures a feuilleter le papier glacé. C'est presque suffisant...